Parmi les festivals français d’électronique, peu tirent réellement leur épingle du jeu. Généralement, le festivalier a 2 options : se rendre à un festival exploitant un lieu d’exception dont la programmation n’est pas à la hauteur ou inversement. Et pour beaucoup d’entre eux, ils se partagent les mêmes têtes d’affiche qu’ils s’arrachent pour des sommes exhorbitantes. Nuits Sonores ne mange pas de ce pain-là et applique depuis 11 ans une formule qui fonctionne encore : rigueur et qualité dans la programmation, mise en valeur et respect du patrimoine lyonnais.
Le festival a été créé en 2002 avec l’idée de construire chaque année un “panorama des musiques électroniques et indie” en mettant Lyon au centre du processus, par l’exploitation de lieux emblématiques ou sous-estimés de la métropole. Et si ça veut dire quelque chose, il est aujourd’hui, en 2013, élu meilleur festival européen par Trax (depuis 2010) et deuxième meilleur festival du mois de mai au monde par Resident Advisor, derrière Movement et devant Mutek, Primavera ou Weather. Chaque année, le festival donne carte blanche à une ville qui sera au coeur de la programmation : on a ainsi vu Montréal, New York, Tokyo et… Lyon mises à l’honneur. Les programmateurs et concepteurs planchent à l’année pour offrir une vision d’ensemble de la musique électronique originelle et actuelle avec des artistes newcomers, confirmés ou mythiques. Chaque plateau est minutieusement préparé avec une cohérence, certes, pas toujours visible, mais palpable. À titre personnel, et c’est l’adolescent lyonnais qui parle, NS est responsable d’une partie de ma culture musicale et chaque édition est relié à un souvenir particulier.
En plus de la musique, les lieux principaux, souvent des hangars, sont entièrement transformés à coups de pelleteuses, marteaux piqueurs, installations, lumières, néons, lasers et j’en passe. Des performances visuelles, musicales et culinaires ont lieu de jour comme de nuit, pour réunir un public large et curieux. Depuis quelques temps, le festival est également devenu un espace de rencontre et de partage entre professionnels de la musique et de l’évènementiel (European Lab). Nuits Sonores est unique esthétiquement, musicalement et spirituellement, grâce à la réunion annuelle de plusieurs genres et publics opposés mais liés. Pourtant, NS n’a toujours pas été victime de son succès. Pierre-Marie Oullion, programmateur musical, et Vincent Carry, directeur de Nuits Sonores et de la plateforme European Lab, vous en parleront mieux que moi.
Vous avez fêté la 10ème édition du festival l’an dernier et avez beaucoup innové à cette occasion. Avez-vous réussi à trouver des nouveautés pour 2013 ?
Vincent Carry : Oui, totalement, on a la programmation de jour, les “NS Days”, qui devient un festival à part entière, le mini sonore, festival pour les enfants qui ouvre une nouvelle perspective car on a une génération de trentenaires/quadra qui peut venir avec ses enfants. Ça reflète aussi notre volonté de ne pas faire grossir le festival de nuit plus ce qu’il n’était puisqu’on considère que 10 000 personnes par nuit c’est le maximum qu’on puisse faire pour accueillir les gens au mieux et rester dans la convivialité des NS et ne pas se transformer en “mass festival” gigantesque qui peut aller jusqu’à 30 000 personnes. Et la 2ème chose qui évolue assez fortement c’est la plateforme European Lab que l’on a créé, c’est le pendant professionnel des NS. Il devient de plus en plus important et accueille cette année une centaine d’internationaux assez conséquents. La troisième chose c’est plus sur le plan artistique, Pierre-Marie va compléter, on reprend de plus en plus de liberté par rapport à notre programmation et on est de moins en moins contraints par la question des têtes d’affiches. On ne court plus après le name dropping sur l’affiche, ce qui est très réjouissant : ça nous permet de faire de plus en plus de découvertes sans avoir peur du remplissage car on a la chance d’avoir un public fidèle. Ce que l’on constate sur la programmation cette année c’est qu’en interne on considère que c’est la programmation la plus risquée que l’on ait fait, mais paradoxalement c’est celle qui marche le mieux en billetterie depuis plusieurs années.
Pierre-Marie Oullion : Sur la prog il y a un travail d’éditorialisation sur chaque plateau qui est très important, de partenariats avec des artistes et une ouverture sur le booking. On est sur une programmation pointue mais qui va toucher certaines générations, communautés, assez fortement. On arrive donc aujourd’hui à cet effet centrifuge sur la programmation et à cet effet découverte. On est très satisfaits des collaborations que l’on a faites, notamment avec Daphni et Pedro (Winter, ndlr) qui ont vraiment apporté des plateaux intéressants.
VC : Et avec les norvégiens aussi !
Au niveau de la programmation : comment est-ce que vous y prenez ? Je suppose qu’il y a plusieurs programmateurs : comment est-ce que vous divisez le travail et comment celui-ci s’effectue-t-il sur l’année ?
PMO : On a un pôle artistique constitué de plusieurs personnalités. On est 3 programmateurs et Vincent coordonne le projet global. On a d’autres personnes dans le pôle artistique donc on fonctionne selon l’envie et la veille artistique qui est primordiale : on a de vraies périodes de recul sur ce qui se passe dans l’actualité pour travailler un peu sur les orientations que l’on a envie de donner. En interne, on fonctionne souvent avec des plateaux. On ne réfléchit pas selon la tête d’affiche mais on réfléchit sur le plateau de jour comme de nuit et on travaille sur son évolution et l’histoire que l’on veut raconter. Ce qui était intéressant cette année, c’est que l’on a de plus en plus travaillé ensemble, entre programmateurs. On a construit des liens entre chaque artiste.
VC : Pour compléter, il y a un certain nombre de sensibilités artistiques qui sont représentées par les différents programmateurs et le but c’est d’avoir à la fois les qualités et niveaux de connaissances de chacun dans différents registres artistiques somme toute complémentaires et le but de tout ça c’est d’avoir la cohérence sous la responsabilité de Pierre-Marie. Comme on le disait, je veille moi-même à la cohérence du projet global dont la programmation musique est un élément parmi d’autres car comme tu le sais on travaille aussi beaucoup sur le choix des lieux, des topographies du festival, son rythme, l’urbanité, la question du patrimoine, de la scénographie etc plus la partie professionnelle. On construit un objet et l’objet artistique final est le festival en lui-même. Sa composante principale c’est la musique, mais ça en est une parmi tant d’autres. Et en termes de rythme de travail, l’été est propice à la veille (capter les influences, les sensibilités), ensuite il y a un travail actif septembre/décembre de prise de contacts, idées, réflexions puis de cristallisations de fin décembre à fin janvier où le dessin apparaît. C’est à ce moment-là qu’il faut que l’on soit sûr de notre coup. Il faut que l’image soit “nuit sonorienne”, qu’elle nous ressemble et qu’elle ne ressemble pas à n’importe quel festival d’été.
À ce propos, il n’y a pas beaucoup de hip-hop contrairement à d’autres années où il y avait MixMaster Mike, Assassin, les World DMC ?
PMO : Il y a Mos Def cette année quand même ! Ce qu’il faut voir c’est qu’on est sur un territoire artistique : il y a un festival de hip-hop qui existe, L’Original, et qui travaille déjà fortement cette question. Nous, on tient à avoir du hip-hop, on a donc Mos Def cette édition, une des plus grosses têtes d’affiche pour nous. Dans notre histoire le hip-hop est très important mais on ne va pas non plus trop loin dans cette esthétique car on a déjà l’occasion d’en voir beaucoup. Il y a Public Enemy qui joue à L’original, MF Doom et d’autres.
VC : On ne veut pas marcher sur les plates-bandes de nos camarades de L’Original et puis historiquement on a interrogé tous les courants venus se connecter sur la culture électronique notamment le hip-hop mais c’est plutôt le lien entre ces 2 cultures que l’on interroge. Et on l’a beaucoup fait à NS et on continuera à le faire.
PMO : On n’est pas non plus des Ayatollah du style. Par exemple pour Mos Def, on construit un plateau autour de la personnalité de Pedro Winter mais qui n’est pas un plateau Ed Banger. À un moment donné, Mos Def a eu une histoire particulière dans la vie de Pedro et nous aussi dans ce que l’on imagine de ce courant musical. On ne va pas forcément dire qu’il nous faut tel ou tel style : si à un moment un style entre dans l’histoire que l’on veut raconter avec un plateau, on va l’intégrer.
D’ailleurs, que s’est-il passé l’an dernier avec MF Doom (annulé au dernier moment et remplacé par Feadz & Para One) ?
PMO : Il n’avait pas pris son avion à Sao Paulo au dernier moment…
VC : Il y avait son équipe et son management à Lyon et lui était à Sao Paulo.
Du coup, y a-t-il des artistes que vous n’avez jamais réussi à avoir ? Je sais que Nôze n’a jamais pu jouer (cf livret du dernier Écho Sonore) ….
VC : Ça c’est différent, c’était durant nos premières années, il y a eu un concours de circonstances qui a fait qu’à chaque fois il y a eu une galère. Une fois c’était notre faute. C’était l’écho sonore numéro 11, on l’avait nous-même annulé. La fois d’après c’était eux qui n’avaient pas pu venir. Une autre fois ils étaient programmés sur un apéro sonore et ils ont versé un verre de coca sur une table de mixage.
PMO : Mais plus sérieusement que ça il y a toujours quelqu’un que tu veux avoir et que tu n’as pas.
VC : Et heureusement d’ailleurs, si on les avait tous eus on ne ferait plus rien
PMO : Effectivement, il y a certains historiques que l’on a eus, et on a été très contents de les avoir. Pour l’instant ça n’a pas de sens de les ressortir mais après il y en a pleins qui sont très durs à avoir. Jamie XX je l’ai demandé énormément de fois en 3 ans. Donc quand on a ce type d’artistes on est très contents. On s’aperçoit que vu que l’on n’est pas un festival de gros cachets, on bloque notre jauge et on est dans des lieux que l’on transforme totalement, et ça a un coût conséquent. Plus que de mettre une scène au milieu d’un champ. Du coup on ne peut pas se payer tout le monde. Au final, les artistes ont de plus en plus confiance dans le festival. Notamment Daphni : il a au départ refusé ma proposition de chapeauter une scène NS mais par contre il m’a avoué avoir passé la meilleure date de la tournée l’an dernier avec Four Tet ! Et l’année d’avant c’était le meilleur concert de Caribou selon lui. Une des grosses forces que l’on a aujourd’hui, c’est le public : notre public est exceptionnel et réceptif. On met en place les conditions d’un festival particulier qui créé cette rencontre, qui la fait fructifier. On arrive donc à avoir des gens pointus comme DJ Harvey, très difficiles à avoir, car on a une réputation au niveau de l’accueil des artistes et du public.
VC : Derrière la notion de festival il y a des réalités très différentes, ça va du festival ultra confidentiel jusqu’à des énormes machines industrielles pilotées par des énormes boîtes avec des enjeux très capitalistiques. Nous on est un festival indépendant et on fait partie des festivals qui laissent le projet culturel exactement au coeur de toute la réflexion et les structures (agences de booking, management) ne donnent pas immédiatement du crédit à ça, mais les artistes, eux, y sont très sensibles. Tous les artistes ne sont pas là pour prendre un cachet et se casser à la fin de leur set. Une de nos priorités en 11 ans a été de construire des relations durables et intéressantes sur le plan culturel pour développer des choses avec des gens très diversifiés Gonzales, Ben Klock, Garnier ou Pedro. Ce sont des choses qui vont au-delà du simple booking et qui remettent le projet culturel au centre du processus. C’est pour nous une nécessité absolue. On éditorialise beaucoup ce que l’on fait. On construit un truc avec Todd Terje en ce moment par exemple. Ce sont des choses qui doivent déborder du contrat de booking.
Vous parlez de budget, j’ai cru comprendre que le festival est quasiment autofinancé ?
VC : La structure Arty farty qui fait NS est financée à 80%. Ce qui est assez exceptionnel.
Justement, comment un festival fait-il pour durer plus de 10 ans de cette façon, sans subventions ?
VC : Des subventions il y en a eu suffisamment au début pour commencer. Le pari était de frapper vite et fort et qu’on trouverait les moyens ensuite pour développer le festival. C’est la mise de départ qui était importante. Le premier financeur du festival c’est le public (60%) puis les entreprises privées (20%) et les financeurs publics (20%). C’est un très bon modèle économique car il garantit l’indépendance totale sur le plan culturel, politique et artistique d’Arty Farty : nous n’avons de comptes à rendre à personne. On peut programmer librement. Le 2ème avantage : avoir une grande diversité de financeurs est moins dangereux que d’en avoir un qui paye tout. En France, beaucoup de festivals sont financés par des collectivités mais à l’étranger, notamment aux Pays-bas, il y a des festivals qui sont financés par des marques. Le jour où un financeur décide d’arrêter, le festival cesse d’exister.
C’est donc pour cela que vous fonctionnez sous forme d’association plutôt que d’entreprises ?
PMO : la raison principale c’est que c’était un projet culturel. Le fait que ce soit sous forme associative veut dire que c’est à but non-lucratif : aucun actionnaire ne gagne le moindre centime avec les ressources d’Arty Farty et des NS. La seule chose que l’on a réussi à faire en 11 ans en termes de développement c’est de créer 11 emplois. Des CDI on ne peut plus sécurisés !
Vous êtes tous les 2 sur le projet Nuits Sonores depuis le début, quelle est votre plus grande fierté en 11 ans ? Est-ce d’avoir pu programmer des artistes importants pour vous ou avoir monté un projet qui dépasse largement les frontières rhône-alpines et françaises ?
VC : On a écrit un livre pour les 10 ans dans lequel on a un peu dit ce qui nous rendait fiers dans tout ça : c’est une fierté très partagée car c’est un évènement extrêmement collaboratif qui a fait intervenir beaucoup de monde, bénévoles, structures et l’équipe en elle-même, à la technique, au catering, à la comm, tout le monde a contribué à fabriquer cet évènement. Mais la plus grande fierté ça rejoint un peu ce que l’on disait avant : tenir aujourd’hui une PME culturelle 100% indépendante dans ce domaine-là pendant 11 ans, c’est un petit exploit. On a toujours payé les salaires de tout le monde tout en étant indépendant à 80%. Le tout en faisant un festival exigent qui garde le cap artistique. On n’a jamais cédé aux sirènes commerciales. C’est d’ailleurs notre meilleure garantie de survie.
Que faisiez-vous avant de monter ce festival ?
VC : On a commencé avec Pierre-Marie avait 7 ans donc il ne faisait rien (rires). Moi j’ai tenu des lieux de musique et j’étais journaliste.
PMO : Moi j’étais étudiant et stagiaire au début. J’ai construit mon parcours professionnel dans Arty Farty. Au départ, j’ai fait des choses en dehors mais j’étais dans une réorientation en termes de parcours universitaire. J’avais un certain background musical qui faisait que j’avais des choses à apporter générationnellement.
Vous avez donc arrêté les Echos Sonores l’an dernier avec le numéro 100 en compagnie de Laurent Garnier. Vous aviez d’autres projets pour la suite, notamment un club à La Sucrière, ou est-ce que ça en est ?
PMO : Ça n’a pas encore commencé, c’est toujours dans les tuyaux et on ouvre fin juin.
VC : Ce sera un lieu pérenne, pas vraiment un club. Un lieu culturel avant tout, dédié à toutes les formes d’innovation dans la création et qui abordera très largement les cultures électroniques et la club culture, les vendredi et samedi. Ce sera ouvert 7 jours sur 7, pas toujours au public, mais également aux entreprises, graphistes.
PMO : Au niveau artistique on décloisonnera pas mal de choses.
Dans la lignée de la Gaîté Lyrique en somme ?
VC : Pas avec les mêmes moyens ! Il y a un rapport d’1 à 50 en termes de taille et de moyens mais dans l’ambition, oui, évidemment. Il y a une proximité intellectuelle et culturelle avec l’équipe de la Gaîté qui est réelle. Je suis d’ailleurs l’un des conseillers artistiques depuis les débuts du projet. Mais au delà de ça, on parlera aussi d’images et comme dit Pierre-Marie on ne s’interdira aucun champ disciplinaire : littérature, fooding…
PMO : On est sur un lieu entièrement auto-financé. Il y a une grosse prise de risques, même 11 ans après !
VC : D’ailleurs, les NS ont 11 ans cette année mais Arty Farty va fêter ses 15 ans en 2014.
Vous faites aussi du management avec Spitzer par exemple ?
PMO : Exact, c’est Lucas et moi qui nous en occupons. On a monté une boîte de booking et l’idée de base était de continuer le travail des NS avec la scène locale : se servir de notre réseau pour accompagner les artistes. C’est une activité intéressante pour nous en termes de portage de projet à l’extérieur de Lyon. On voulait avoir des artistes internationaux. Maintenant sur l’activité de management, on arrive à une certaine maturité après 3-4 ans d’activités : on a des artistes comme Spitzer qui ont sorti un super album en septembre, Kid A qui est sur Ninja Tune, Acid Washed qui sortira son album sur Record Makers au mois de mai, Danger qui a un vrai projet artistique très fort même s’il ne sort pas beaucoup de choses et Reworks aussi. On travaille avec Superscript2 sur leur projet d’installation qui s’appelle LazerLazer. C’est un travail ultra intéressant qui nous permet de toucher d’autres réseaux et de travailler un peu plus sur du hardware au niveau de projets artistiques. C’est aussi pour nous une vraie boîte à outils pour monter des projets un peu partout dans le monde. On est une sorte d’équipe de foot ! C’est beaucoup de travail. En ce moment il se passe plein de choses. L’album de Spitzer ça a été une vraie locomotive qui n’avait pas trop bougé depuis 2-3 ans. On accompagne le groupe en accélérant sa dynamique.
Pensez-vous un jour lancer un label ?
PMO : On a déjà un label, un label de projets. Arty Farty est une association qui est une marque de fabrique dans la construction de ces projets. On travaille sur la ville, l’exigence, c’est là où se situe notre travail.
VC : Le principe c’est que nous on aime beaucoup avoir des collaborations avec des labels comme InFiné. Ça ne nous empêche pas non plus si l’on veut être éditeurs, de sortir un bouquin (cf : 10 ans des Nuits Sonores), on a fait une compilation sur la scène lyonnaise et aussi un magazine. On peut sortir tout ce qu’on veut mais disons qu’il y a quand même ce principe de rester sur son métier. Le label c’est extrêmement complexe aujourd’hui, notamment sur le plan financier. C’est une forme de précarité supplémentaire. Pour avoir sous les yeux pleins de labels indépendants qui essayent de faire vivre leurs boutiques, on sait que c’est très compliqué. On préfère travailler avec des labels que l’on aime bien qui ont les boîtes à outils et le professionnalisme pour le faire plutôt que de rajouter encore cette dimension pour l’instant. Si dans quelques années l’on a des projets discographiques qui nous tiennent à coeur, on pourra toujours le faire. On a sorti un coffret musical sur l’histoire de Berlin, un vinyle sur le son de Portland. On est toujours à l’affût de ce genre de projets mais on ne veut pas en faire le coeur de notre métier en tout cas. Pour terminer, dans notre activité de management, il faut que pour chaque artiste l’on conseille le label, le graphiste ou le booker le plus pertinent pour un artiste qu’on manage. Il faut que l’on ait un éventail.
Il y a 5 ans j’avais assisté à une soirée Architectures Sonores, est-ce que ça se fait toujours ?
PMO : C’est dans le cadre d’un dispositif que l’on a mis en place. C’est une des innovations de cette année. Lors de la Nuit 2 du festival qui est une nuit à étapes co-construite avec les clubs et collectifs de la ville, ce qui montre que l’on a travaillé avec énormément de gens. Ça a évolué cette année : avant on faisait un appel à projets à tout notre réseau. Maintenant on travaille avec des programmateurs. Elle aura lieu dans 10 endroits. Cette année il a une couleur plus rock et plus indé car on a travaillé avec les programmateurs des salles de concert. On a inscrit les lieux qui ont un vrai travail à l’année. On voulait s’échapper de lieux qui n’avaient aucune programmation à l’année mais dont on avait besoin pour faire des étapes. Il y a un vrai repérage de la scène locale.
VC : Les 2 personnes à l’origine de ce projet sont devenus les architectes et scénographes de NS. Ils sont aussi les architectes du projet sur le toit de la Sucrière. Ils ont donc eu un magnifique destin avec nous ! (rires)
Il n’y a jamais eu de Boiler Room aux Nuits Sonores…
PMO : Justement, j’ai un entretien Skype maintenant avec les mecs de Boiler Room ! Ça va donc se faire, on travaille le line-up, ça fait 2 mois que c’est confirmé on n’a pas trop communiqué dessus pour l’instant car on n’a pas arrêté le lieu encore. C’est un dispositif hyper intéressant car ils ont créé au-delà du côté “happy few” qui ne me plaît pas forcément, un format de set libre. On ne demande pas aux artistes la même chose que sur scène : tu mixes dans ta chambre, t’as 45 minutes. Et c’est ce que j’adore dans ce projet.
Meilleurs souvenirs lives, humains ? Déceptions ?
PMO : Pire souvenir : quand j’ai su l’annulation de MF Doom à 15h le jour de son live, au dernier moment par exemple… J’ai trouvé ça vraiment moyen. Le mec s’en foutait complètement. Je voulais le voir depuis super longtemps, grosse déception. On m’avait prévenu qu’il était un peu dilettante. Nous on a passé énormément de temps à préparer sa venue et attendre sa confirmation donc dès que quelqu’un annule c’est très décevant. Après, il y a énormément de meilleurs souvenirs, c’est un peu dur de hiérarchiser. Il y en a plus que des mauvais en tout cas ! L’an dernier, il y a eu le set de Four Tet & Daphni qui était un très bon moment avec Flying Lotus. Ou, oui, un moment de ouf, au début de NS, je me souviens avoir emmené dans ma 205 Junior Mark E. Smith, le chanteur de The Fall, et Michael Rother (Kraftwerk et Neu!) qui sont 2 mythes de la musique indé et underground. J’en ai plein d’autres mais avoir les 2 dans ma voiture, c’était un très bon moment. Après les moments sur scène je peux t’en citer un paquet : il y a eu le set de Joy Orbison juste après Shackleton, les 2 c’était vraiment dingue, tu rentrais dans la salle tu avais envie de danser de suite. Il y a eu Jamie Liddel qui a fait des concerts de fous sur la 2ème année des NS. C’était assez incroyable. Puis Gonzales qui a fait Unspeakable Orchestra en concert de clôture, c’était vraiment génial. Pierre-Henry aussi, ça fait partie des moments importants.
Nuits Sonores, du 7 au 12 mai à Lyon. Retrouvez tout un tas d’artistes dont on a déjà parlé ici : Ark, Breton, Connan Mockasin, Daphni, Hold Youth aka Seuil & Le Loup, Le K, MCDE, Prins Thomas, Rone, Spitzer et bien d’autres !
Merci à Ambre pour avoir arrangé l’entretien et à Pierre-Marie et Vincent pour leur disponibilité. Retrouvez Nuits Sonores sur Facebook, internet et Twitter, achetez vos places sur Digitick.
Interview réalisée par @CyprienBTZ